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Conférence de Diwele

Par LUCIE TOURNEAU, publié le jeudi 5 janvier 2023 15:26 - Mis à jour le jeudi 5 janvier 2023 15:38
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L'artiste sud-africain nous a rendu visite pour une conférence chantée et dansée... Remerciements : Nathan Prost (1ere5), Gabrielle Guenat (1ere5), Mathys Giroix (TG1) et Florence Rousselet (professeure d'anglais)

         Je suis, car tu es.

         Telle est la philosophie de l'Ubuntu, une pensée sud-africaine dont les piliers sont le pardon, la réconciliation et la dignité. Et même si cette philosophie a une portée pacifiste, elle a beaucoup été mise en avant en Afrique du Sud lors de l'apartheid pour combattre les discriminations raciales. Diwele a vécu cet apartheid et l'a combattu. Et il nous a rassemblés en cercle, symbole d'égalité et de transparence, pour nous parler, nous émouvoir et nous faire danser dans le but de comprendre le combat des Sud-Africains en ces temps sombres.

         Diwele est né durant l'apartheid et a connu cette ségrégation qui s'opérait partout dans le pays. Des plages aux bus en passant par le sport. Jamais les blancs ne se confrontaient avec les noirs. L'artiste a vu le jour dans une petite ferme dont le propriétaire était blanc. Son père était contremaître et sa mère cuisinière. Il nous a raconté que le cousin du propriétaire des lieux était le chef d'un parti raciste qui persécutait les populations noires. Sortir devenait dangereux même pour simplement rendre visite à un ami. Les coups, la torture et la mort devenaient un quotidien dont Diwele s'était imprégné malgré lui.

         « Il y avait des chasses noires, on chassait des hommes. Les coups, la torture et la mort, c’était quotidien. »

         Même si Diwele allait à l'école, il nous a expliqué que les enseignements qu'il recevait ne provenaient pas d'une véritable volonté d'instruire mais ne s’apparentaient à un pur endoctrinement. On enseignait aux hommes les maths, les tâches jardinières et les travaux d'usine et on les initiait à l'Afrikaans, la langue des blancs du pays mais peu parlée dans les autres pays du monde. Et c'est ce dernier enseignement, qui ne faisait que briser l'identité des noirs sud-africains, qui a provoqué des soulèvements.

         En 1976, le soulèvement de Soweto éclata : les écoles se vidaient de leurs élèves tour à tour, tous, motivés même par leurs parents, descendaient dans les rues, allaient manifester, confronter la police armée en face à face. C’était des enfants, la police ne pouvait tirer. Et eux, n’avaient pas peur, ils étaient tous ensemble, ils formaient un groupe invincible, chacun apportait qui il était aux autres et rendait le groupe plus fort. Et ils chantaient et ils dansaient, c'était là le pilier de leur union.

         « Sans identité, il n’y a pas de lutte »

         Le but du régime de l'apartheid n’était pas tant de tuer les populations noires que de les faire devenir dépressifs, de leur faire perdre espoir, perdre toute envie de se battre. Mais encore une fois, la danse et le chant furent une arme qui leur permit de traverser ces moments-là. L'une des rares libertés des populations oppressées était celle de danser. Alors ils en ont fait leur force. La police avait des armes à feu. Eux, n'avaient que leurs pieds et leurs mains. Et pourtant, nous le savons maintenant, l'apartheid a bien été aboli.

        

         Mais outre les explications, la conférence était basée sur la danse et sur les chants. Diwele nous appelait régulièrement à nous lever et à danser ensemble, sans gêne et sans crainte, pour véhiculer des émotions. Il nous incita à danser comme les étudiants lors du soulèvement de Soweto. Et à travers ces danses et nos pieds qui frappaient le sol, ensemble, nous avons ressenti cette unité. Nous n’étions qu’une dizaine de personnes mais, à ce moment-là, nous avions le sentiment d’être des centaines, des milliers qui frappaient dans leurs mains à l’unisson.

          Diwele nous a également initiés au Pata Pata de Miriam Makeba ainsi qu’au gumboots, une danse composée de percussions corporelles utilisée par les mineurs dans les mines d’or pour communiquer car ils n'avaient pas le droit de se parler.

 

         La conférence de Diwele peut sembler étrange au premier regard et à la première écoute, certes. Cependant, de part cette étrangeté, il nous a imprimé des sentiments puissants que l'on éprouverait pas en écoutant une banale conférence uniquement parlée. Et ces souvenirs qu'il nous a véhiculés, ce combat pour la liberté, cette nouvelle manière de voir le monde à travers son prochain... Tous ces éléments rassemblés ont fait souffler un vent magique sur cette conférence où le temps s’est fait oublier.

 

Article rédigé par Nathan Prost (1ere 5)

Photo : Gabrielle Guenat (1ere 5)

 

Remerciements à nos musiciens : Mathys Giroix (TG1) et Florence Rousselet (professeure d’anglais)